Qui sont les sept divinités du bonheur japonaises ?

Les sept divinités du bonheur sur leur navire, Kitao Shigemasa (Photo wikipedia)

 

Parmi les très nombreuses divinités japonaises qui existent, je souhaitais aborder dans cet article sept divinités spéciales, associées au bonheur : les shichifukujin 七福神, les sept divinités du bonheur.

Ces divinités du bonheur sont très populaires, particulièrement au moment de la nouvelle année. C’est à ce moment que les sept divinités arrivent sur leur navire appelé Takarabune, pour distribuer des richesses aux plus méritants…

De gauche à droite : Ebisu, Daikokuten, Bishamonten, Benzaiten, Jurôjin, Fukurokuji et Hotei

 

Les sept divinités du bonheur sont les suivantes : Ebisu, Daikokuten, Bishamonten, Benzaiten, Fukurokuji, Jurôjin et Hotei. La grande particularité de ces divinités, c’est qu’elles ont des origines différentes. Trois sont originaires de Chine, trois d’Inde et une seule de ces divinités est japonaise.

Les divinités du bonheur ont émergé vers la fin de l’époque Muromachi (1392-1568). Dans un premier temps, les trois divinités les plus populaires étaient Ebisu, Daikokuten et Bishamonten. Par la suite le culte de Benzaiten, la seule femme du groupe, est devenu très populaire, alors elle a remplacé Bishamonten dans le trio.

C’est pendant l’ère Edo (1603-1868) que les divinités du bonheur ont été regroupées sous leur forme actuelle. Le culte semble être originaire de la région de Kyôto, puis s’est propagé dans la ville d’Edo (Tokyo) avant d’atteindre tout le Japon. Chacune de ces divinités est associée à une vertu que je préciserai entre parenthèses.

Statue d’Ebisu au temple Daishô-in de Miyajima

 

Ebisu (l’honnêteté)

Commençons par la seule divinité japonaise, Ebisu 恵比寿. En plus d’être associé au bonheur, Ebisu est lié au monde des affaires et considéré comme le dieu des pêcheurs. On le reconnaît facilement grâce à son chapeau kazaori eboshi, sa canne à pêche et sa daurade.

Il y a plusieurs mythes sur la naissance d’Ebisu. Selon le plus répandu, Ebisu serait en fait Hiruko, le premier enfant conçu par Izanami et Izanagi, les kami (divinités shintô) créateurs du Japon. Comme Hiruko est né mal formé il fut abandonné par ses parents à la mer. Les textes mythologiques expliquent que la malformation d’Hiruko fut causée par le fait qu’Izanami (kami femelle) ait parlé la première lors de l’union, alors que c’était à Izanagi (kami mâle) de faire la demande en mariage.

Après avoir dérivé sur les flots, Hiruko aurait atteint les rivages de l’île d’Ezo (ancien nom d’Hokkaidô) où il aurait été recueilli par les Aïnous, le peuple qui habite ces terres, et en particulier par une divinité locale appelée Ebisu Saburô 戎三郎. Hiruko va progressivement apprendre à marcher et prendre le nom d’Ebisu.

Il y a une légende sur Ebisu que j’aime beaucoup. Au Japon, les kami se réunissent tous les mois d’octobre au sanctuaire Izumo-taisha pour décider de l’avenir du pays. On appelle ce mois sans kami kannazuki 神無月 et pendant ce mois, seules deux divinités ne sont pas présentes au sanctuaire Izumo-taisha : Suwa Myôjin, parce que sous sa forme de dragon il est beaucoup trop grand, et Ebisu puisqu’il est sourd et n’entend pas l’appel.

Statue de Daikokuten, temple Daishô-in de Miyajima

 

Les trois divinités originaires d’Inde : Daikokuten (la fortune), Benzaiten (l’amabilité) et Bishamonten (la dignité)

Daikokuten 大黒天 est un membre important des divinités du bonheur. On le reconnaît facilement grâce à son maillet (photo ci-dessus), qui a pour particularité d’exaucer les vœux. Il s’agit dans le bouddhisme de la divinité Mahakala, une manifestation du dieu destructeur hindou Shiva, qui se serait converti au bouddhisme.

Lorsque le bouddhisme fait son apparition au Japon, il ne chasse pas les anciennes croyances, rassemblées sous l’appellation shintôisme, au contraire les divinités vont en quelque sorte fusionner. Avec ce syncrétisme, Daikokuten est associé à Ôkuninushi 大国玉, le kami du sanctuaire Izumo-taisha et ancien dirigeant du Japon. Les deux premiers kanji d’Ôkuninushi 大国 peuvent se lire aussi Daikoku.

Daikoku est souvent représenté avec Ebisu, certaines légendes font même d’Ebisu le fils d’Ôkuninushi, appelé Kotoshironushi et donc le fils de Daikokuten puisqu’il est censé être Ôkuninushi.

Statue de Bishamonten au temple Tôdai-ji de Nara

 

Benzaiten 弁財天 est la seule divinité femelle de cette joyeuse troupe. Elle est la déesse de l’éloquence et des arts, elle est souvent représentée avec un biwa un instrument de musique japonais.

Benzaiten est issue de la déesse Sarasvati, qui est la personnification de la rivière du même nom. Cette rivière est connue pour son murmure, dont le son ressemble à de la parole. Benzaiten est donc associée à l’eau, mais aussi aux serpents. D’ailleurs elle a pris de nombreux attributs du kami de la fertilité Ugajin, représenté sous les traits d’un serpent avec une tête humaine.

Bishamonten 毘沙門天 est une divinité importante du bouddhisme, puisqu’il s’agit de Vaisravana, un des quatre rois célestes 四天王 (Shitennô). Les rois célestes sont les gardiens de la loi bouddhique, ils punissent tous ceux qui enfreignent la loi. Un temple à Ôsaka, le temple Shitennô-ji, leur est dédié.

Chaque roi céleste est également le gardien d’un point cardinal. Bishamonten, appelé aussi Tamonten, est le roi céleste le plus fort, il est le gardien du Nord. Il est reconnaissable grâce à la pagode (ou stupa) qu’il tient dans sa main droite. Bishamonten est aussi une divinité associée à la guerre.

Les trois divinités originaires du taoïsme chinois : Fukurokuji (la popularité/le bonheur), Jurôjin (la longévité) et Hotei (la sagesse)

Fukurokuji 福禄寿 et Jurôjin 寿老人 sont deux divinités difficiles à cerner. Cette difficulté ne vient pas de leur physique, puisque les deux divinités ne se ressemblent pas du tout. Fukurokuji est très reconnaissable avec son crâne chauve et surtout très long, alors que Jurôjin est décrit comme un vieil homme. La difficulté vient du fait que ces deux divinités sont associées au même dieu taoïste du nom de « vieil homme du pôle sud« . Ce dieu est la personnification de l’étoile Canopus, la 2e étoile la plus brillante du ciel. C’est pour cette raison que beaucoup confondent les deux divinités.

Fukurokuji est associé à la longévité et la sagesse, il porte dans la main gauche un bijou et dans la main droite un parchemin. Jurôjin, quant à lui, est souvent représenté accompagné d’un cerf. En raison de leur ressemblance, Fukurokuji a parfois été remplacé par d’autres divinités associées au bonheur.

Enfin, Hotei 布袋 est la seule des sept divinités à être issue d’une vraie personne : un moine bouddhiste du nom de Budai, qui vécut à l’ère des Tang. Hotei est souvent représenté avec un gros ventre et de longs lobs, il porte aussi un grand sac rempli de trésors.

Estampe de Takarabune, par Utagawa Hiroshige (photo wikipedia)

 

Takarabune, le navire des divinités

Les sept divinités du bonheur sont souvent représentées sur leur navire appelé Takarabune 宝船. Pour la nouvelle année, ils débarquent à bord de leur navire pour distribuer des richesses à tous ceux qui le méritent.

Le Takarabune contient de nombreux trésors comme le chapeau d’invisibilité 隠れ笠 kaguregasa, le sac de fortune 布袋 nunobukuro, la robe de plume 羽衣 hagoromo ou encore les rouleaux de sagesse et de longévité 巻き物 makimono. Ces objets sont souvent portés par les divinités du bonheur elles-mêmes, comme par exemple la robe de plume qui est portée par Benzaiten.

Outre la visite des divinités en début d’année, afin d’avoir de la chance pour toute l’année il est de coutume de mettre une image du Takarabune sous son oreiller avant de dormir au nouvel an. Le premier rêve de l’année 初夢 hatsuyume est décisif et détermine si l’année en cours sera pleine de bonheur ou non, alors pour qu’elle soit chanceuse il est recommandé d’avoir le Takarabune près de soi pendant ce rêve.

Il existe également des pèlerinages dédiés aux divinités du bonheur appelés 七福神巡り shichifukujin meguri. Pour effectuer ce type de pèlerinage, il suffit de visiter sept temples dédiés aux divinités du bonheur, un temple par divinité. Ces temples sont souvent situés à proximité les uns des autres et leur visite vous permettra d’obtenir sept goshuin (calligraphies) différents. Réunir les sept goshuin vous portera chance pour l’année en cours, c’est pour cette raison que ces pèlerinages sont très populaires à la nouvelle année. La Balade du Sakura a fait une vidéo très sympa de son pèlerinage sur l’île d’Awaji , je vous laisse y jeter un œil.

 

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Voilà pour cette présentation des sept divinités du bonheur. J’aime beaucoup le fait qu’on puisse s’attirer un peu de chance lors de la nouvelle année en priant ces sept divinités. J’aimerais beaucoup faire un pèlerinage des temples dédiés aux sept divinités du bonheur !

J’espère que ça vous a plu, on se retrouve bientôt pour un nouvel article.

 

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